Chargé de la logistique dans l’un des cinq cars partis d’Aix, j’ai pu apprécier hautement la bonne ambiance, amicale et fraternelle, qui régnait dans ces JMJ, y compris face aux très nombreux imprévus, qui nous rappellent que nous sommes toujours dans la main de Dieu… C’était l’heure pour tous de s’abandonner en confiance à la Providence divine, et de mettre à profit chaque instant pour ne pas les perdre dans les files d’attente, métros bondés, lecture de cartes, repérage dans les transports en communs : « il faut prier sans cesse et ne pas se décourager ! » (Lc 18, 1).
Durant les quatre premiers jours, le car 1 était accueilli dans la petite paroisse de Villaseca de la Sagra, près de Tolède. Quel accueil ! La paroisse et la mairie s’étaient pliées en quatre pour nous loger, nous instruire, nous divertir : courses de taureaux, feux d’artifices, apéritifs, durant la fête du village. Nous avons pu goûter là à l’hospitalité espagnole, et c’est dans les larmes des familles d’accueil, du curé et de la sacristine qui avait tout diligenté, que nous sommes partis le 15 août à Tolède, pour la grande messe d’envoi de tous les jeunes du diocèse de Tolède et de ceux qui y étaient hébergés. Nous y avons retrouvés notre diocèse, notre archevêque, et de très nombreux français, montrant bien là la vitalité de l’Eglise en France.
Le lendemain notre diocèse avait choisi de faire une halte à Avila, haut lieu de la spiritualité du Carmel, autour des grandes figures de sainte Thérèse et de saint Jean de la Croix : journée de « retraite » et d’oraison, pour bien entrer dans la démarche des JMJ, et pouvoir accueillir tout ce qui y serait donné dans une terre travaillée, prête à recevoir la semence. Journée que tous ont beaucoup appréciée, édifiés par un magnifique enseignement du P. Raphaël Bouvier sur la foi et la confiance, qui a marqué durablement tous les esprits.
A Madrid, avec les enseignements des différents évêques venus nous parler de la foi, je retiendrai comme temps fort le chemin de croix présidé par le pape. Les textes, d’une simplicité et d’une profondeur émouvantes, les chants, les jeunes de différents milieux et conditions se relayant pour porter la croix, tout concourait à nous faire entrer dans le mystère de l’Amour de Dieu pour tous les hommes, même les plus faibles et les plus indignes aux yeux de leurs frères. Amour qui est allé jusqu’à la mort, et la mort de la Croix. Amour fou, dont on ne peut faire le tour, qui nous surprend toujours, et nous laisse sans voix : « Que dire après cela ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Lui qui n’a pas épargné son propre Fils, mais l’a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute faveur ? Oui, j’en ai l’assurance, ni mort, ni vie, ni anges ni principautés, ni présent ni avenir, ni hauteur ni profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 8, 31-32. 38-39). Mystère de la compassion que l’Eglise a pour chacun de ses enfants et pour tous les hommes de bonne volonté, que l’on pour ainsi dire pu « sentir » durant ce chemin de croix.
De même, la veillée sur l’aérodrome de Cuatro-Vientos, perturbée par un vent violent et quelques gouttes de pluie, a été le témoignage frappant de l’enthousiasme de la foi des millions de jeunes présents : alors que les écrans s’éteignaient, que le vent couvrait les voix du pape et du diacre lisant l’évangile, quand toute la technique s’est tue, des milliers de voix se sont mises à acclamer le pape (que les intempéries n’épargnaient pas), à chanter les louanges de Dieu, qui domine le tonnerre… Quel contraste avec l’adoration qui a suivie, faite dans un silence total, rempli de la prière fervente de toute l’assemblée qui montait devant le Seigneur présent dans le fragile Saint-Sacrement. Adoration qui s’est en quelque sorte étendue à la messe du dimanche, où nous n’avons pu communier qu’en esprit – ce qui est une expérience de pauvreté et d’humilité édifiante.
Puis nous voilà reparti loin des foules pour une journée de relecture. Notre premier arrêt fut à Barbastro, où nous avons découvert l’histoire des 51 séminaristes clarétins martyrs en 1936 : « enracinées et fondés dans le Christ », avec une foi si bien affermie qu’ils ont donné leur vie pour le Christ dans la persécution. Nous n’avons pas manqué de prier avec ferveur pour nos prêtres et les séminaristes de note diocèse en formation à Aix, pour qu’ils aient tous la même force dans le témoignage dans la contradiction. Et que le Seigneur nous donne de nombreux et saints prêtres !
Enfin, dernier arrêt à Torreciudad, sanctuaire marial tenu par l’Opus Dei, lieu propice à une relecture sérieuse de tout ce que nous avions vécu durant ces JMJ : recueillir toutes les grâces vécues, pour s’en souvenir, engranger cette moisson, qui fut abondante, pour que, de retour en Provence et dans la grisaille des jours ordinaires, chacun puisse semer ces grâces dans sa vie quotidienne : en choisissant ainsi l’Amour du Seigneur dans chaque chose ordinaire, mettre tout son cœur ainsi rempli à les rendre extraordinaire, avec l’aide de Dieu ! Ce sera l’enjeu du retour des JMJ : tenir fermes dans la foi exaltée par ce grand rassemblement. Mgr Dufour, qui a tout partagé de ces JMJ avec ses jeunes (jusqu’à dormir par terre à la belle étoile avec eux à Cuatro-Vientos !), a beaucoup insisté sur cet avenir. Les choix du diocèse, avec Avila et Torreciudad, ont efficacement soutenu cette démarche. Prions Dieu que tous les jeunes, enrichis par ces JMJ, rayonnent de la joie d’être chrétien dans notre monde et dans nos communautés !
Franck DE MARC,
séminariste peyrollais et JMJiste