Eau Vive n°544

Un enfant nous est né !

            Noël : la seule évocation de ce mot semble presque magique ! En le disant, viennent immédiatement à notre esprit des images de lumières dans la nuit, de neige (même pour nous, provençaux !), de cadeaux, d’enfants qui sourient, de feu dans la cheminée, de repas en famille… Ce sont aussi tout autant de souvenirs, heureux, qui remontent du plus profond de notre mémoire : un jour béni où tout paraît beau, simple et vrai. Rappelez-vous les Noël de votre enfance…

            Mais, même si la laïcité (ou plutôt une certaine conception !) voudrait nous le faire oublier sous couvert de « fêtes de fin d’année », Noël c’est d’abord l’évocation, la mémoire de la naissance de Jésus (Noël vient du latin natalis, de naissance). Si nous n’avons dans les Évangiles aucune indication sur le jour précis de cet évènement, le lieu par contre nous est bien précisé ; que ce soit chez St Matthieu pour accomplir la prophétie de Michée (Mi 5,1) ou chez St Luc pour rappeler la descendance de David (Lc 2,4), c’est bien à Bethléem (littéralement « la ville du pain ») que nait celui que l’on appellera pourtant Jésus de Nazareth.

            Dans l’inspiration du grand Saint François d’Assise, la Provence s’est plu à développer toute une spiritualité autour de la crèche. Il ne s’agit pas d’ailleurs avant tout d’accentuer, comme le fait la pastorale des santons, l’exclusion dont auraient été victimes Marie et Joseph, les obligeant à se réfugier dans une grotte isolée de tout ! On peut aisément comprendre par contre qu’il n’y avait pas la place suffisante dans la « salle commune » pour permettre l’intimité nécessaire à un accouchement, et que la présence des animaux de l’étable garantissait facilement la chaleur nécessaire à un nouveau-né. Mais cette spiritualité, par contre, nous parle du grand mystère d’un Dieu qui se fait homme à la manière des hommes, de la façon la plus humble, et non pas comme les riches et les puissants de ce monde. Rien d’étonnant, dès lors, que les premiers à vouloir faire le déplacement pour lui rendre hommage soient aussi des pauvres : les bergers !

            Reculons un peu, pour mieux embrasser du regard cette jolie crèche. C’est donc à « la ville du pain » que vient de prendre vie celui qui se présentera comme le Pain de Vie. Et voilà ces pauvres bergers venus contempler un bébé qui deviendra, bien qu’ils l’ignorent encore, un grand berger lui-même, le Bon Berger de toute l’humanité enfin rassemblée. Peut-être même lui apportent-ils un petit agneau, en offrande, à lui qui se fera offrande, à la manière d’un agneau immolé : « Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Et s’ils trouvent indignent de ce descendant du roi David le bois de la crèche, seront-ils là, au Golgotha, pour vénérer le bois de la croix sur lequel sera élevé « le roi des juifs » ?

     C’est parce que la crèche est toute humble, qu’elle permet de révéler la grandeur de Dieu.

     C’est parce qu’elle est toute simple, qu’elle est transparente au mystère insondable de Dieu.

     C’est parce qu’elle s’adresse aux petits et aux pauvres, qu’elle peut parler à tous de Dieu.

                                                                                                                        Père Michel Isoard

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