Homélie du 4ème dimanche de carême – Année A
Dimanche du Gaudete
( 1S 16, 1b.6-7. 10-13a ; PS 22(23) ; Ep 5, 8-14 ; Jn 9, 1-41)
Chers amis,
En ce quatrième dimanche de carême, l’Église nous invite à la joie. En pensant à tout ce que nous vivons ces jours-ci, je me suis demandé si cette invitation n’était pas quelque part utopique. Mais en lisant et en méditant les textes qui nous sont proposés en ce jour, mon sentimentalisme s’est estompé et a laissé place à la foi et à l’action de grâce. Et pourquoi ? Pour la simple raison que les rencontres avec le Seigneur sont toujours sources de joie. On dit d’ailleurs traditionnellement de l’évangile de Jean qu’il est celui des rencontres personnelles avec le Seigneur.
Ainsi, Dimanche dernier, nous avons assisté à la particulière rencontre de Jésus avec la samaritaine ; une rencontre qui a débouché sur une belle profession de foi. Et aujourd’hui encore, en ce 4ème dimanche du temps de carême, l’Église nous propose une autre rencontre, assez singulière cette fois-ci, puisqu’elle met en scène essentiellement un aveugle de naissance et Jésus, mais aussi un certain nombre de personnages. Sans nous donner des détails sur le contexte, l’évangéliste nous dit que Jésus vit un aveugle et sur ses yeux appliqua de la boue en lui demandant d’aller se laver à Siloé. Le nom est déjà évocateur et Jean tient à le souligner. Siloé signifie « envoyé ». Nous y reviendrons.
Ce qui est sûr, c’est qu’une fois guéri, le pauvre « désormais ex aveugle » va subir un certain nombre d’interrogatoires. Lui qui ne demandait qu’à voir, le voilà désormais ballotté d’un conseil de prêtres à un autre. Mais il ne se démonte pas. Il tient à exprimer sa reconnaissance. Donc, pas question d’abandonner Jésus en vivant dans une forme de dénégation de sa toute-puissance. Malgré les obstacles, il va persévérer. Il va tenir bon dans sa foi à son sauveur. Tenir sa foi constante en Dieu donne énormément de la joie. Et je trouve personnellement qu’en plus de faire un break à la mi carême pour fêter et crier la joie, ce texte vient bien à propos pour nous parler de la joie. C’est vraiment l’exemple de l’homme qui a accepté la rencontre avec le Seigneur et qui a surtout accepté de faire le chemin avec lui. Nous pourrions prendre cette période de confinement comme une opportunité de nous laisser rencontrer par le Seigneur. Il a quelque chose à nous dire. Et nous ne pouvons l’entendre qu’en osant la rencontre ; une rencontre qui n’est pas sans embûches et sans obstacles ; une rencontre qui n’est pas sans difficultés, sans épreuves, quelquefois dues à notre péché…
Chers amis,
Cet aveugle-né illustre notre condition naturelle à tous. Le péché nous rend incapables de percevoir la lumière de Dieu ; la Véritable Lumière qui est Jésus Lui-même. Notre vision morale et spirituelle est obscurcie depuis notre naissance. Et Seul Dieu est capable de nous ouvrir les yeux sur notre état, sur les exigences de sa sainteté, sur le monde… Mais il ne peut accomplir ce signe que si nous nous laissons atteindre et rejoindre au cœur de ce qui fait nos misères. Sa puissance, comme le dit l’apôtre Paul, ne s’accomplit que dans la faiblesse ; dans cette reconnaissance de notre finitude.
Contrairement à ce qu’ont pensé les disciples de Jésus, ce n'est pas à la suite d'un péché particulièrement grave que Dieu a puni cet homme et ses parents; mais cette infirmité va être l'occasion pour Jésus de faire briller sa grâce ; de montrer sa toute-puissance. Et il le fait à partir d’une chose quasi insignifiante : de la boue. Cette boue, chers amis, est une figure de son humanité présentée à l'homme. En l’appliquant sur les yeux de l’aveugle, Jésus re-crée. Il re-crée l’homme. Non pas parce que l’œuvre créatrice de son Père fût imparfaite, mais simplement pour rétablir l’homme dans la dignité de ce qu’il avait perdu par son péché : la Lumière. Ainsi, pour voir, l’homme doit être lavé: la Parole (l'eau) lui révélant le Christ comme l'envoyé de Dieu (Siloé). L'aveugle s'en va croyant, et il revient voyant, en ayant à cœur de rendre témoignage. L’évangéliste nous dit que les voisins, ceux qui le connaissaient, en le voyant, s'étonnent : Est-il possible que ce soit lui? Et lui les assurait que c’était bien lui.
Chers amis, une conversion ne peut pas passer inaperçue. La nôtre a-t-elle produit dans notre vie un changement visible par tous? Ou, sous un vil prétexte de pudeur, nous préférons que personne ne le sache. Aujourd’hui, le Seigneur nous demande deux choses essentiellement : Que nous croyions en Lui, que nous osions la rencontre avec Lui ; et qu’ayant découvert la véritable Lumière, nous allions trouver les hommes pour témoigner de notre foi. Aujourd’hui nous sommes en confinement. La meilleure manière de témoigner pourrait être d’appeler ceux et celles que nous connaissons et qui ont souvent été seuls pour prendre de leurs nouvelles. Dieu s’en trouvera glorifié et il nous bénira, Amen.
Gildas DOSSOU, Diacre