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Eau Vive n°595

LA JOIE DE L’AMOUR

C’est ainsi que le pape François a appelé son exhortation qui fait suite au double synode sur la famille. Après « la joie de l’Évangile », on reconnaît là le fil conducteur de son pontificat ainsi que le parti pris de regard d’espérance qu’il entend poser sur la mission de l’Église comme sur notre monde dans ses différentes réalités.

Pour autant, le souverain pontife n’est pas naïf et son expérience pastorale, ainsi que ses origines, lui permettent de rappeler « la réalité et les défis de la famille » (Chap. 2), en tendant vers le plus d’exhaustivité possible, même si cela est rendu difficile, voire impossible, par la diversité des situations que connaissent les familles dans le monde.

Mais ce constat ne met que plus encore en valeur le rappel de « la vocation de la famille » (chap. 3), depuis l’engagement du couple, la transmission de la vie jusqu’à l’éducation des enfants. Le pape va même développer de façon assez personnelle cet aspect par deux longs chapitres sur « l’amour dans le mariage » (chap. 4), d’abord, puis « l’amour qui devient fécond » (chap. 5). Voilà de magnifiques pages à lire et méditer pour tous les couples et les familles, qui se présentent comme une méditation à partir de l’Hymne à la charité de Saint Paul (1 Co 13), texte que beaucoup de couples d’ailleurs choisissent pour leur célébration de mariage. Comme le reste de l’Exhortation, il n’est pas possible ici, sauf trahison, de résumer ces passages : on ne peut qu’invite à aller s’y plonger soi-même…

À partir de ce rappel, le texte peut alors donner « quelques perspectives pastorales » (chap. 6) pour être au service de cette vocation du couple et de la famille : il s’agit tout autant de la préparation au mariage que de l’accompagnement des familles, en intégrant aussi les possibles crises et jusqu’à l’épreuve du deuil. François tient à réserver un chapitre spécial sur « l’éducation des enfants ».

Ce n’est qu’ensuite, et la chronologie est ici importante, que le pape évoque comment « accompagner, discerner et intégrer la fragilité » (chap. 8). Derrière le terme utilisé alors de « situations irrégulières », il ne faut pas voir uniquement la question des divorcés-remariés tant attendue par certains et notamment les médias, même si elle est abordée, mais tout un ensemble de « situations de fragilité ou d’imperfection » abordées par le Synode. Mais là encore, le ton est bien celui du pape François au cœur de l’Année jubilaire de la miséricorde : « À ce sujet, je vou­drais rappeler ici quelque chose dont j’ai voulu faire clairement part à toute l’Église pour que nous ne nous trompions pas de chemin : Deux logiques parcourent toute l’histoire de l’Église : exclure et réintégrer. La route de l’Église, de­puis le Concile de Jérusalem (Cf. Ac 15), est toujours celle de Jésus : celle de la miséricorde et de l’intégration. La route de l’Église est celle de ne condamner personne éternellement ; de répandre la mi­séricorde de Dieu sur toutes les personnes qui la demandent d’un cœur sincère ; la charité véritable est toujours imméritée, incondition­nelle et gratuite ! Donc, il faut éviter des jugements qui ne tiendraient pas compte de la complexité des diverses situations ; il est égale­ment nécessaire d’être attentif à la façon dont les personnes vivent et souffrent à cause de leur condition » (n°296).

L’analyse du pape est alors très fine, précise, pour éviter toute ambiguïté, d’un côté comme de l’autre : « Il est mesquin de se limiter seulement à considérer si l’agir d’une personne répond ou non à une loi ou à une norme générale, car cela ne suffit pas pour discerner et assurer une pleine fidélité à Dieu dans l’existence concrète d’un être humain… En même temps, il faut dire que ce qui fait partie d’un discernement pratique face à une situation particulière ne peut être élevé à la catégorie d’une norme » (n° 304). Face à ceux qui pourraient être déçus de ne pas trouver dans ces pages des « scoops médiatiques » ou des révélations inattendues, le pape rappelle, s’il était besoin, « qu’on ne devait pas attendre du Synode ou de cette Exhortation une nouvelle législation géné­rale du genre canonique, applicable à tous les cas » (n°300).

Pourtant, le ton du pape François est bien donné : en présentant la famille et l’amour sur le mode de la joie, en n’ayant pas peur d’aborder la dimension érotique de l’amour conjugal et l’éducation sexuelle des enfants, en parlant de situations délicates en termes de gradualité, d’intégration et de discernement, le tout dans une attitude de miséricorde, se confirme la volonté de ce pape d’annoncer à tout prix, à notre monde, l’Évangile comme la joie d’une Bonne Nouvelle pour tous !

Père Michel

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